2/3 L’un a fait la France ; l’autre a largement contribué à la défaire… […] La question: «Que ferait de Gaulle?» n’est pas si sotte ni si vaine que cela car il a laissé une doctrine simple: celle du souverainisme selon laquelle le peuple est l’horizon indépassable de toute vérité politique, ce qui ne va pas sans l’indépendance de la France, une puissance et une force, une potentialité et une énergie à maintenir coûte que coûte. Le chef de l’État ne se sert pas de l’État mais il le sert, car il est lui-même un instrument au service de la volonté populaire. Le fin mot de la République est donc la consultation électorale qui permet de savoir ce que veut le peuple. Dans cette configuration, l’objectif du chef de l’État n’est pas de tout faire pour être élu ou réélu, mais de proposer un contrat social auquel seul le peuple peut consentir et qu’il est le seul à pouvoir rompre: l’élection permet en effet le mouvement politique par excellence, la dynamique démocratique - élection ...
Le Grillon
Un pauvre petit grillon
Caché dans l'herbe fleurie
Regardait un papillon
Voltigeant dans la prairie.
L'insecte ailé brillait des plus vives couleurs ;
L'azur, la pourpre et l'or éclataient sur ses ailes ;
Jeune, beau, petit maître, il court de fleurs en fleurs,
Prenant et quittant les plus belles.
Ah! disait le grillon, que son sort et le mien
Sont différents ! Dame nature
Pour lui fit tout, et pour moi rien.
je n'ai point de talent, encor moins de figure.
Nul ne prend garde à moi, l'on m'ignore ici-bas :
Autant vaudrait n'exister pas.
Comme il parlait, dans la prairie
Arrive une troupe d'enfants :
Aussitôt les voilà courants
Après ce papillon dont ils ont tous envie.
Chapeaux, mouchoirs, bonnets, servent à l'attraper ;
L'insecte vainement cherche à leur échapper,
Il devient bientôt leur conquête.
L'un le saisit par l'aile, un autre par le corps ;
Un troisième survient, et le prend par la tête :
Il ne fallait pas tant d'efforts
Pour déchirer la pauvre bête.
Oh! oh! dit le grillon, je ne suis plus fâché ;
Il en coûte trop cher pour briller dans le monde.
Combien je vais aimer ma retraite profonde !
Pour vivre heureux, vivons caché.
Jean-Pierre Claris de Florian
" Pour vivre heureux, vivons cachés ", " Chacun son métier, les vaches seront bien gardées "... Qui sait aujourd'hui que l'on doit ces formules au plus prodigieux des fabulistes du XVIIIe siècle, Jean-Pierre Claris de Florian (1755-1794) . Florian, dont la brève existence fut un véritable tourbillon, professait qu'il est, en matière d'écriture, un principe souverain: l'art de " conter gaiement ". Chacune des pièces du petit recueil qu'il publie en 1792 est donc une véritable fête de l'esprit. Les animaux, les hommes, les dieux mêmes s'affrontent, se combattent, s'entraident parfois en une série de petits tableaux vivants dont la modernité étonnera le lecteur d'aujourd'hui. Si Florian, tout comme son grand-oncle Voltaire, déteste la superstition, les injustices et la guerre, il a pour la nature une tendresse particulière. Le chien, la brebis, le rhinocéros, la vipère, la guêpe s'étonnent de la brutalité des hommes, le pauvre bouvreuil meurt de leur indifférence, et il faut toute la sagesse de l'éléphant blanc pour nous faire comprendre ce que l'humanité gagnerait à simplement observer les animaux. Ecologiste avant l'heure, Florian nous avertit que l'intérêt nous conduit à la ruine et qu'il y a urgence à trouver la paix de l'esprit au coeur d'une " retraite profonde ", dans l'un de ces asiles qu'offre la nature.
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